Serge Lutens, chic & chic

C’était il y a quelques semaines…

Vous embarquiez avec moi à la découverte des Salons du Palais Royal, une expérience inédite, hors du temps, un moment magique.

Je vous parlai du lieu plutôt que de l’homme, gardant les détails pour le second billet que voici, attendant la sortie de L’Eau Serge Lutens…

Allez la découvrir (depuis hier au Palais Royal, à partir du 15 février sur le site).

Il est différent, ce nouveau jus : « frais comme une chair d’enfant, doux comme le hautbois, vert comme la prairie », un parfum qui sort d’un recueil de Baudelaire, une odeur de propre pourtant !

Mais il y a plus que l’Eau dans cet article, heureuse surprise, inespéré cadeau…
Serge Lutens aime les questionnaires et s’est plié aux règles du nôtre, depuis son jardin en ville, à Marrakech.
Il vit là, dans un temps qui n’appartient qu’à lui, hors normes, hors modes.
Et moi, à Paris, je frétillais comme un gardon en recevant ses réponses.

Vous allez découvrir un artiste boudeur, rêveur, plein d’humour et d’auto-dérision, tour à tour rieur ou grognon (une des lunes de son plafond est sûrement changeante, comme lui. Telle une horloge le temps, elle indique son humeur).
On le ressent dans ses réponses que je vous livre comme un trésor.

Pour mieux les appréhender, quelques clés, indices ramassés ici ou là, éclairent ou alimentent le mystère Serge Lutens.

(Je mets dans mes parfums) « ma réflexion, mon goût, mon dégoût, ma peur, ma révolte, ma haine pure, une joie d’ordre imprévu, un incendie, un crime, un torrent, une bibliothèque, des milliards de dollars, une baguette magique, l’éclat vivant d’une étoile déjà morte depuis deux mille ans… » S.L.

Artiste complet et autodidacte, il a survolé différentes disciplines, avec succès, aisance, facilité apparente, mais travaillant sans relâche à donner une réalité concrète à ses fantasmes.
Coiffeur, maquilleur, photographe, cinéaste.
Le talent transpire de lui et se propage, se reconnaît, se salue, depuis la fin des Années 50 jusqu’à aujourd’hui et pour longtemps encore.

C’est peut-être pour cela qu’il est devenu parfumeur… exhaler son génie, l’emprisonner pour le préserver dans un flacon qui ressemble fort à la lampe d’Aladin.
Les 1001 Nuits, sans nul doute, font penser à lui, car avant tout il est conteur d’histoires, dealer de rêves…
Un poète, au crépuscule des Dieux.

« Le musc et l’aurore ont tissé leur toile. Territoires, pièges et œuvres comme devrait l’être tout parfum » S.L. (à propos de Clair de Musc)

Parcourez ses créations et dites moi si leur nom seul ne vous évoque pas déjà une essence, un souvenir, un émoi…
Ambre Sultan, Datura Noir, Féminité du Bois, Nombre Noir, Tubéreuse Criminelle ou Cuir Mauresque, pour n’en citer que quelques uns.
Tous issus d’heureux hasards, étourdissants, essences précieuses, langoureux vertiges.

L’audace de Serge Lutens, sa terreur sublimée, il la raconte dans les parfums de sa vie.
Il joue avec la matière, s’en étonne, s’en amuse, nous ensorcelle.

« … vraies odeurs de peaux, lourdes, imposantes, qui demandent souvent de la patience pour s’y habituer. » S.L.

Un magicien donc, un sorcier, un misanthrope, qui cache un enfant sauvage, fuyant inexorablement, mais qu’on a envie d’aimer, malgré lui, à son insu.
Car ne nous y trompons pas : les créations de Serge Lutens, comme lui, ont besoin du contact pour exister, même si ce n’est pas la caresse que vous croyez.

« Comme une robe ou une étoffe, un parfum sans une personne qui l’anime n’est rien d’autre que lui-même » S.L.

Je l’imagine, seul au jardin, soudain surpris par un effluve escaladant le mur : Bornéo 1834, sec, soyeux, chaud… altéré, très légèrement, par l’inconnu(e) invisible qui le porte, de l’autre côté, dans la rue.
Il esquisse alors un sourire, songeur.

Je vous laisse avec lui maintenant, en tête à tête.
Simplement, du fond du cœur et du creux de mon poignet Gris Clair,
Merci Monsieur Lutens,

« Grâce à vous un parfum a passé dans ma vie… »

Là j’esquisse à mon tour, une révérence malicieuse.



Questionnaire Chic & Geek

1. Etat civil

Serge Lutens

2. Un livre

C’est impossible mais, c’est le jeu : Le miracle de la rose de Jean Genet

3. Un film

C’est impossible mais… Ludwig de Luchino Visconti

4. Un site internet

On m’en présente. Je ne les connais pas.

5. Un héros

Je n’en ai pas. C’est selon.

6. Un parfum

Cuir Mauresque

8. Une oeuvre d’art

Impossible mais de Rembrandt à Bacon.

10. Un côté du lit

Trop petit pour changer.

11. Un désir

Celui de l’instant.

12. Un bruit

La pluie au sec.

13. Un secret

Celui que je garde

14. Un sac

… à malices.

17. Un luxe devenu nécessaire

Lire ou écrire dans la matinée.

18. Dernier cadeau offert

Des livres

19. Dernier cadeau reçu

Un sourire dans la rue

22. Premier amour

C’est vieux mais ça s’appelait pas comme ça.

23. Première déception

Se reporter à la question précédente.

24. Meilleur(e) ami(e)

Mes auteurs préférés.

26. Surnom amoureux ridicule

Ca dépend qui le dit.

27. Drogue favorite

L’idée d’être soumis et dépendant à l’une d’elles, quelles qu’elles fussent, m’est odieuse.

28. Une ambition

Me dépasser sans avoir à rejoindre.

29. Une insulte

Selon ; mieux pour vous de ne pas l’entendre.

30. Votre petit déjeuner

Rien.

31. Prochain voyage

Marrakech-Paris, Paris-Marrakech.

32. Un cadeau qui vous ferait plaisir aujourd’hui

Des mouchoirs en lin blanc

33. Sous-vêtements

Propres… si possible

34. Votre activité préférée

Lire

36. 3 indispensables de votre garde-robe

Des chemises blanches, des cravates noires et des costumes noirs parfaitement repassés.

37. 3 indispensables de votre trousse de toilette

Un rasoir, une mousse à raser, un savon de Marseille.

38. Ce que vous aimez chez vos amis

Qu’ils me fichent la paix.

39. Une devise

Je n’en ai pas.

40. Dernière journée sans internet

Tous les jours sauf lorsqu’on me rend visite et qu’on m’indique ce qu’il faut y voir.

41. Dernier orgasme

Et vous madame ?

42. Soleil ou pluie

Légèrement nuageux avec éclaircies

43. Ville ou campagne

La question pour moi ne se pose pas trop : campagne en ville

44. Un fantasme

Ils sont nombreux mais ils passent vite.

45. Famille ou amis

Peu d’amis, pas de famille.

46. Blonde ou brune

Blonde pour la bière, pour les autres, cela dépend.

47. Il y a le feu: vous sauvez un objet, lequel?

Je me servirai de la devise de Jean Cocteau : « J’emporterai le feu »

48. Mac ou PC

Je ne connais pas.

49. Or jaune, rose ou platine

Platine.

50. iPhone ou Blackberry

Ni l’un, ni l’autre.

51. Ce dont vous êtes fier

Ma solitude et l’indépendance qu’elle me procure.

52. Caviar ou pizza

Je préfère le potage.

53. DVD ou cinéma

DVD

54. Du soir ou du matin

Soir pour l’amitié, matin pour la réflexion et la concentration

55. Vous aimeriez qu’on dise de vous dans votre dos que …

Les choses les mieux, les choses les pires.

56. Caresses ou gratouilles

Ni l’un ni l’autre, je n’aime pas cela.

59. Jogging ou télévision

Jogging devant le DVD. Jamais de télévision

60. Vous vous êtes senti totalement ridicule quand …

Devant ce questionnaire.

61. Boire ou conduire

Ni l’un ni l’autre.

62. Poker ou légos

Je ne joue pas, je perds tout le temps

63. La question que nous aurions du vous poser

Que pensez vous des femmes à barbe et supplément de la question : pensez vous qu’elles doivent se raser

64. Etat présent de votre esprit

Ouf, c’est fini !


Lien:

Le site officiel de la marque Serge Lutens

Adresse:

Serge Lutens – Les Salons du Palais Royal
25, rue de Valois
75001 Paris

18 réflexions sur “Serge Lutens, chic & chic

  1. clara dit :

    Merci Anne, pour cet article très poétique ,on le porte avec soi longtemps après la lecture ,comme un parfum !
    J’aime le contraste entre la pudeur qui émane des réponses minimalistes et la générosité des créations de Monsieur Lutens .
    Au-delà des mots et de la réserve ,on subodore l’insoupçonnable légèreté de l’Etre.

  2. Isa dit :

    Anne, ce billet est un cadeau !
    Merci à Monsieur Lutens de s’être prêté à ce questionnaire.
    J’espère que ce grand Monsieur de la parfumerie continuera encore longtemps à nous faire rêver….

  3. Nad. dit :

    Je m’agenouille devant vous, MONSIEUR !!!
    Beau reportage ma toute doucette, Anne
    Cela me donne envie de m’ennivrer de ces flagrances
    Bisous

  4. sarah dit :

    Quand la sensibilté d’une plume rencontre celle d’un véritable Artiste !
    Mais Anne, comment as-tu fait pour apprivoiser ce misanthrope atypique ?

  5. @ Clara : ta plume est belle… quel commentaire poétique ! Une histoire à porter comme un parfum, j’aime l’idée !
    @ la Mère Joie : Tu sais que sans toi et TA réponse au questionnaire citant fumerie turque, rien de tout cela n’aurait été possible… MERCI !
    @ Little Sushi : merci à toi
    @ Isa : Oh oui j’espère aussi… tu as raison, c’est du rêve en flacons.
    @ Nad : Tu es trop gentille et je partage ton admiration pour cet homme d’exception.
    @ Stéphanie : merci beaucoup ! Si tu viens à Paris, on y fait une virée ensemble !
    @ Isabelle : sentir un billet, pas simple. Mais avec un sujet pareil, tout est possible…
    @ Sarah : Je ne l’ai pas apprivoisé, tout juste virtuellement rencontré… et respiré !
    Toutes : si vous avez des questions pour Monsieur Lutens, pourquoi ne pas les réunir ici et faire notre questionnaire qu’on lui enverrait ? Il nous répondra peut-être ! Il ne tient qu’à vous de mieux le découvrir… et de continuer l’aventure.

  6. Ah, c’est énorme !!!!!!!
    Je n’y aurais même pas cru si on me l’avait dit. Bravo pour ton blog, c’est une vraie reconnaissance, et bravo pour le questionnaire, à la fois intéressant et amusant !

  7. Magnifique article ! Je lis toujours tes commentaires chez Deedee sans jamais prendre le temps de venir chez toi. et bien, je suis contente de m’être rattrapée aujourd’hui !!!
    Outre le fait que la présentation et l’article lui-même sont excellents, je suis « tout songe » depuis que j’ai lu ces lignes: « « frais comme une chair d’enfant, doux comme le hautbois, vert comme la prairie », un parfum qui sort d’un recueil de Baudelaire, une odeur de propre pourtant ! » Il faut absolument que mes sens partent à la rencontre de ce parfum 🙂

  8. Superbe ! Bravo Anne pour ses posts sur Serge Lutens! Décidément grâce à toi et à Frieda, je sens que je vais faire une halte au Palais Royal lorsque j’irai à Paris!
    J’aime bien la réponse pour le bruit la pluie au sec.

  9. Diane dit :

    Pour la 1ère fois, je viens d’être infidèle …
    SL m’a emmené à BORNEO, nous sommes en 1834…j’entends le bruit de la pluie …
    Bravo pour ce questionnaire qui confirme mons entiment : c’est un grand monsieur !

  10. Merci Anne pour cette incursion poétique et un peu magique dans l’univers fantastiquement renversant de Serge Luten, inconditionnelle de Muscs Khoublaï Khan qui est devenu pour moi l’odeur de ma peau et de bois vanille qui m’enivre de chaleur,mais aussi de tous les autres que je ne porte pas mais dans lesquels j’aime m’étourdir quelques instants chaque fois que je passe au palais royal, tu viens de me donner un accès au monde mystérieux de Monsieur Lutens, cet enchanteur du parfum me fascine, il capture des émotions et les transforme en essences enivrantes et magiques, jusqu’à présent il restait pour moi un vrai mystère au vu du peu d’interviews et tu viens de m’entrouvrir un peu le secret de son Grand Oeuvre.

    mille fois merci anne pour ce deuxième moment de rêverie que tu viens de m’offrir

  11. MrsB dit :

    Oh Lutens j’adore, je vénère, je m’y ruine tout autant que chez Goutal.
    Ses réponses sont charmantes, que demander de plus.
    Un véritable artiste cet homme très concentré, très rigoureux.

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