Marc Jacobs – Louis Vuitton : Black Swan Song

« Comment dire adieu à Louis Vuitton? » C’est la question à laquelle a répondu brillamment Marc Jacobs, créateur devant l’Éternel, par un dernier défilé pour la Maison mythique qui était bien plus que ça: un spectacle, une performance artistique, un hommage, un merveilleux cadeau.

Si les rumeurs bruissaient dans les couloirs de la fashion Week, la découverte du décor installé dans la Cour Carrée du Louvre a annoncé, dans un camaïeu de noirs, vernis, mat, grisé, soyeux, de jais… la couleur de l’événement. C’était un enterrement. En grandes pompes. Le plus beau, le plus fascinant, majestueux. Des funérailles de créateur virtuose qui transcende la Mort, des images à coller sur le Requiem de Mozart.

Les pendules ne se sont pas arrêtées comme pour Wystan Hugh Auden, mais l’horloge, celle de la fameuse gare du Louis Vuitton Express, tournait à rebours, remontant dans le passé les 16 années qu’a duré l’idylle Marc Jacobs / Louis Vuitton.
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Flashback dans mon cœur.

Chaque étape couverte de suie du parcours des mannequins, réveillait une émotion, un souvenir. De la Fontaine de Jouvence aux couloirs de l’hôtel du scandale, en passant par le manège enchanté, les escalators et le sublime ascenseur pour l’échafaud.
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Couronnées des plumes d’un aigle noir, les oiseaux rois de Marc Jacobs, dans un bruissement d’ailes, semblaient tombés du ciel.
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Les showgirls arpentaient la scène sur un tapis à damier de fourrure moelleuse, telles des cocottes endeuillées, le front haut et d’un bon pas, pour faire honneur à Marc…
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Clin d’œil à Kate Moss, une autre star de 40 ans, la sublime Eva Herzigová, chevauchait le sombre destrier du carousel.
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A ce stade, je vous propose de regarder la vidéo en intégralité, ou de la mettre de côté pour un moment plus propice, avec une boîte de kleenex à proximité.

Afin de ne pas décevoir ceux qui n’ont pas eu le temps ou la possibilité de visionner, voici le défilé en images arrêtées, autrement appelé lookbook, dans l’ordre, avec la plus indécente des créatures en ouverture, sa pudeur couverte de graffitis Vuitton, bijoux des poignets aux chevilles, pieds nus… pas de sac, ni de vêtements, rien à vendre que du rêve.
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La suite en galerie cliquable pour agrandir.


Enfin, le cygne noir qui clôturait le show.
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Et puis, bravant la foule et sa timidité, Marc Jacobs, sous les applaudissements d’un public debout, ému aux larmes, tirant sa révérence humblement avant de disparaître dans la nuit de ce matin d’octobre…
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Marc !!! Reviens…

OK, je pleurais. Mais pas comme vous croyez. Pas de tristesse.

Parce qu’en y regardant de plus près, ces costumes qu’on a aperçus comme un à-côté de l’histoire, les dernières créations de Marc Jacobs pour Louis Vuitton, étaient un Hymne à la Joie !

Les pampilles de jais suspendues, les broderies sur le tulle, les sacs de plumes, les croisillons des robes, les jeans strassés, la résille magnifiée… tous ces détails étaient dignes des plus grands ateliers de Haute-Couture. Un travail titanesque pour des pièces à exposer dans un musée.
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J’avoue, je dévaliserais bien le musée en question pour enfiler ces boots et la petite robe noire, un perfecto de cuir embossé et un sac hibou, le temps d’un soupir de béatitude 😉

Il est très beau là-haut mais j’ai en réserve une photo de Monsieur Jacobs par un fameux Marquis*, avec des yeux miroirs d’une âme pure et blanche, d’enfant émerveillé.
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C’est la petite fille qu’il éveille en moi, chaque fois, que je retrouve dans ces yeux-là (lalala lalala)…

MERCI MARC.

LOVE, ALWAYS.

Anne

*Vous trouverez sur le site de l’adorable Marquis de Lannes la lettre d’Adieu de Marc Jacobs qui était jointe au dossier du défilé…

NB: Les autres images proviennent de Vogue UK qui en a des centaines, toutes merveilleuses, pour continuer la découverte…

18 réflexions sur “Marc Jacobs – Louis Vuitton : Black Swan Song

  1. Ping : Marc Jacobs for Louis Vuitton S/S 2014 : Black Swan Song | How to say goodbye? | chics & fashion

  2. MrsB dit :

    Bel hommage !

    Il y a de fabuleux détails très « couture », rien n’est vulgaire.
    La chute sur le magnifique dos caramel est superbe.

    La figure de proue enchainée à je ne sais quoi sous ses tags Vuitton, vous pensez qu’elle signifie : libéré du joug Elvéhemhach’ ? 😉

    • Anne dit :

      Évidemment c’est une figure de proue ! Que n’y ai-je songé ? Mes lectrices (et surtout une) ont l’art de me dire le lendemain les mots que je cherchais la veille 😉
      Pour le joug, si c’en est-un, il va rester encore un peu puisque Bernard Arnaut doit l’aider à mettre en place l’entrée en bourse de son propre petit groupe éponyme dans les 3 ans qui viennent… mais oui, il y a de l’émancipation dans l’air, du Spartacus Jacobs.

  3. Murielle dit :

    J’en suis sans voix, pour une fois, j’aime tout.
    Surtout bravo à toutes les petites mains qui ont fait un travail d’orfèvre, broderies etc…

    • Anne dit :

      N’est-ce pas que c’est de la belle ouvrage ??? je donnerais beaucoup pour posséder une relique de cet événement 😉

    • Anne dit :

      Si seulement… mais enfin cela ne me dit pas ce que tu en as pensé et nous sommes ouvertes à la critique 😉 n’aie pas peur, Stelda !

  4. Je le regarde et je pense à ce dîner funèbre organisé par des Esseintes, le héros de Huysmans, apogée de sa carrière de dandy mondain, avant de se retirer définitivement du monde. Ce dîner en noir, avec les fontaines crachant de l’encre de seiche et les oursins servis dans les assiettes, la table tendue de velours de deuil. On y est.
    Où Marc a-t-il l’intention de se retirer? Va-t-il devenir humble moine bouddhiste consacré à son art? Couturier finissant, amoureux de sa gloire passée? J’espère le meilleur.
    Je me pose la question de ces pages emplumés. J’y vois une signification, une clef que je n’arrive pas à décoder. Des funérailles encadrées par des pages facétieux, ça cache quelque chose.

    • MrsB dit :

      Dans les plumes on pourrait y voir, l’aigle noir de Barbara, le chant de cygne (noir) * très romantique, les plumes de paon pour la fierté du chemin accompli et l’ouverture boursière ou que sais-je un subtil mélange qu’on ne connaitra pas. 🙂

      … A rebours, Huysmans, ce texte là non ?

       » Il s’acquit la réputation d’un excentrique qu’il paracheva en se vêtant de costumes de velours blanc, de gilets d’orfroi, en plantant, en guise de cravate, un bouquet de Parme dans l’échancrure décolletée d’une chemise, en donnant aux hommes de lettres des dîners retentissants, un entre autres, renouvelé du xviiie siècle, où, pour célébrer la plus futile des mésaventures, il avait organisé un repas de deuil.
      Dans la salle à manger tendue de noir, ouverte sur le jardin de sa maison subitement transformé, montrant ses allées poudrées de charbon, son petit bassin maintenant bordé d’une margelle de basalte et rempli d’encre et ses massifs tout disposés de cyprès et de pins, le dîner avait été apporté sur une nappe noire, garnie de corbeilles de violettes et de scabieuses, éclairée par des candélabres où brûlaient des flammes vertes et, par des chandeliers où flambaient des cierges.
      Tandis qu’un orchestre dissimulé jouait des marches funèbres, les convives avaient été servis par des négresses nues, avec des mules et des bas en toile d’argent, semée de larmes.
      On avait mangé dans des assiettes bordées de noir, des soupes à la tortue, des pains de seigle russe, des olives mûres de Turquie, du caviar, des poutargues de mulets, des boudins fumés de Francfort, des gibiers aux sauces couleur de jus de réglisse et de cirage, des coulis de truffes, des crèmes ambrées au chocolat, des poudings, des brugnons, des raisinés, des mûres et des guignes ; bu, dans des verres sombres, les vins de la Limagne et du Roussillon, des Tenedos, des Val de Peñas et des Porto ; savouré, après le café et le brou de noix, des kwas, des porter et des stout.
      Le dîner de faire-part d’une virilité momentanément morte, était-il écrit sur les lettres d’invitations semblables à celles des enterrements. »

      *Schubert

      • Oui oui, celui-là très exactement! Merci! L’image m’avait marquée. D’ailleurs ils ne servent pas du tout d’oursins, mais ils auraient pu. J’ai vu l’exacte transposition de ce dîner dans la mise en scène du défilé. Le parallèle entre Marc Jacobs et des Esseintes me frappe.

      • MrsB dit :

        Les oursins seraient parfaits, absolument, d’ailleurs c’est sûrement une coquille de l’ éditeur, non ? Quel dommage le texte aurait tellement plus de piquant 🙂

        Dites-moi Eudoxie, que pensez-vous de la collection Dolce Gabbana hiver 2013/2014, oui je sais on est déjà parties en été 2014, mais tout de même l’automne vien t juste d’arriver.

      • Anne dit :

        Ah que j’aime à vous lire toutes les deux ! Si Huysmans s’invite, on l’accueille volontiers… quelle référence merveilleuse !!! Une fois encore la mémoire m’en est revenue en vous lisant et vos commentaires me ravissent.
        J’étais plus sombre, pensais « Thomas de Quincey buvant l’opium poison doux et chaste… À sa pauvre Anne allant rêvant. »
        J’avais bien évoqué le chant du cygne noir et cité sans vergogne Barbara… mais Des Esseintes !!!! Et cet extrait… Merci les filles. Figurez-vous que mon papa m’a dit, jaloux, y avoir songé aussi en voyant l’article, puis avoir abandonné l’idée de commenter en vous lisant, si intimidé et fasciné qu’il était par votre érudition 🙂
        Je suis très fière de vous !
        Bisous
        Anne
        PS : curieuse, je vais voir de quelle collection vous allez parler je file regarder les archives des sites spécialisés.

  5. Ping : Marc Jacobs for Louis Vuitton S/S 2014 : Black ...

  6. MrsB dit :

    Oh il faut que je rende justice à Eudoxie et à Monsieur ton Père, ma chère Anne, j’ai lu À rebours et la proposition d’ Eudoxie a fait splach : bon sang mais bien sûûûr, mais je n’y avais aucunement songé en regardant les images ; j’étais avec la musique de Schubert, le chant du cygne, voici la fin partons avec une émotion infinie (tout est dans le regard que tu as déniché chez le fameux Marquis).

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